La physique nucléaire à la découverte des artéfacts du monde : premières images en 3D de la plus ancienne église chrétienne de Russie
MOSCOU, 11 juillet 2019 /PRNewswire/ -- Les scientifiques de la NUST MISIS, en collaboration avec leurs collègues de l'Institut de physique P.N. Lebedev de l'Académie des sciences de Russie, de l'Institut Skobeltsyn de physique nucléaire de l'Université d'État Lomonossov de Moscou et de l'Université d'État du Daguestan ont publié les premiers résultats du « balayage » par muographie d'un espace souterrain situé dans la forteresse Naryn-Kala de Derbent. Selon les conclusions préliminaires des scientifiques, l'hypothèse avancée par les archéologues selon laquelle ce bâtiment était un temple chrétien est probablement correcte. Si cette théorie est confirmée, il s'agit là de l'une des plus anciennes églises au monde.
Ce bâtiment de 12 mètres est presque entièrement enseveli. Seul un fragment d'un dôme à moitié détruit est visible. La construction se trouve dans la partie nord-ouest de la forteresse Naryn-Kala de Derbent et date de l'an 300 apr. J.-C. À ce jour, la fonction du bâtiment reste une énigme : réservoir, temple chrétien ou temple du feu zoroastrien ? S'il s'agit réellement d'un temple chrétien, ce pourrait être le plus ancien du pays, et même l'une des plus anciennes églises chrétiennes au monde. Elle aurait été recouverte de terre par les Arabes après la prise de Derbent vers 700 apr. J.-C.
Il était impossible aux archéologues de trancher car l'excavation du temple, qui a servi pendant deux siècles de réservoir, risquait de détruire un site du patrimoine mondial de l'UNESCO. Pour étudier les lieux, les scientifiques ont donc utilisé la muographie en disposant plusieurs détecteurs à émulsion nucléaire perfectionnés à l'intérieur d'un bâtiment enfoui à une profondeur de 10 mètres. L'expérience s'est déroulée de mai à septembre 2018. Les premières données obtenues ont confirmé l'efficacité de la méthode utilisée pour étudier cet objet particulier.
L'expérience avait pour but d'évaluer la faisabilité d'une étude de l'objet archéologique choisi par muographie, de déterminer la durée optimale d'exposition, le nombre, la taille et l'emplacement des détecteurs, et d'obtenir les premières images de l'objet à l'aide d'émulsions nucléaires. La fiabilité de la muographie pour l'étude du bâtiment a été confirmée par les résultats obtenus à l'aide du détecteur muonique (en effet, la densité du sol autour du bâtiment et les murs en calcaire coquillier entraînaient des doutes à ce sujet), qui ont par ailleurs suggéré la marche à suivre pour une expérience grandeur nature afin d'établir les contours du bâtiment tout entier.
Grâce au premier test, les physiciens avaient déjà constaté, dans l'aile occidentale du bâtiment, une répartition inhabituelle des flux de muons. Elle peut être liée à des vestiges de structure, impossibles à distinguer à cause de fragments de murs situés en surface. La construction, en calcaire coquillier local, mesure environ 11 mètres de haut et s'étend sur 15 mètres du sud au nord, et sur 13,4 mètres d'ouest en est. Les segments (branches) de ce tracé cruciforme ont une largeur d'environ 5 mètres. Trois branches mesurent environ 4,2 mètres de long, et la quatrième (nord), plus de 6 mètres. Les supports sont surmontés de voûtes, et un dôme en fil de fer de cinq mètres de diamètre se trouve au centre.
Dans plusieurs sources historiques et de référence, cette construction est décrite comme un réservoir d'eau souterrain. Elle était en effet utilisée comme tel aux XVII et XVIIIe siècles. Toutefois, la première expérience a jeté un doute sur cette hypothèse. La forme en croix et l'orientation vers les quatre points cardinaux du bâtiment suggèrent fortement une fonction religieuse. Elles étaient inhabituelles pour les réservoirs, mais courantes pour les églises et les temples du feu.
« L'idée que cette construction est un réservoir d'eau me semble très étrange. Dans cette forteresse de Naryn-Kala se trouve une structure souterraine similaire à 10 mètres de profondeur. Et il s'agit bien d'une citerne. C'est un simple bâtiment rectangulaire. La construction inhabituelle, dans laquelle nous avons placé nos détecteurs, est en forme de croix, orientée strictement sur les quatre points cardinaux. Un côté est plus long que les autres de deux mètres. Comme l'ont déclaré les archéologues qui ont débuté les fouilles, pendant sa construction, le bâtiment entier était à la surface et occupait le point culminant de Naryn-Kala. Pourquoi placer la citerne à la surface, sur la plus haute montagne de surcroît ? C'est bizarre. Pour l'instant, nous avons plus de questions que de réponses », explique la directrice du groupe scientifique, Natalia Polukhina, docteure en physique et mathématiques, spécialiste réputée de la NUST MISIS.
Comme le soulignent les auteurs de l'étude, les caractéristiques de la radiation de sondage sur cet objet requièrent l'irradiation ultérieure de détecteurs muoniques dans la zone concernée, et donc, la poursuite des expériences. L'installation de détecteurs sur le versant ouest de la forteresse hors des murs du bâtiment sera particulièrement efficace pour l'obtention d'une image souterraine de ce dernier en grandeur réelle. La prochaine étape des expériences consistera essentiellement à réaliser un tomogramme en 3D du bâtiment souterrain. Nous pourrons ainsi comprendre à quoi servait cette construction inhabituelle.
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